Comment se procurer les statuts d’un syndicat ?

Lors de la Grande ConfĂ©rence sociale des 20 et 21 juin 2013, les pouvoirs publics ont exprimĂ© leur intention de renforcer le dialogue social, ce qui ne peut se faire sans « la promotion de l’engagement syndical et professionnel et sans la promotion de militants antĂ©cĂ©dents et expĂ©riences ». Il semble alors nĂ©cessaire de rappeler les grands principes de la libertĂ© syndicale.

La libertĂ© syndicale est au cĹ“ur des droits fondamentaux des employĂ©s et permet d’exercer la dĂ©mocratie dans les relations de travail. Il s’agit d’une libertĂ© protĂ©gĂ©e par la Constitution, qui comporte deux dimensions principales. Il vise avant tout Ă  la libertĂ© individuelle de dĂ©fendre ses droits et ses intĂ©rĂŞts en adhĂ©rant Ă  l’union de son choix. Il vise Ă©galement la libertĂ© collective de crĂ©er un syndicat professionnel.

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ConsidĂ©rant que la loi Le Chapelier des 14 et 17 juin 1791 avait interdit tout professionnel , la loi du 21 mars 1884 reconnaĂ®t expressĂ©ment la libertĂ© d’association. Cela a Ă©tĂ© pleinement inscrit au paragraphe 6 du prĂ©ambule de la Constitution de 1946 , qui stipule que « tout homme peut dĂ©fendre ses droits et ses intĂ©rĂŞts par une action syndicale et adhĂ©rer au syndicat de son choix ». Le Conseil constitutionnel lui a confĂ©rĂ© une valeur constitutionnelle en incorporant le prĂ©ambule du bloc de constitutionnalitĂ© dans sa dĂ©cision du 16 juillet 1971. La solution a Ă©tĂ© confirmĂ©e par une dĂ©cision du 25 juillet 1989.

La libertĂ© syndicale fait Ă©galement l’objet d’une protection internationale, tant au niveau de l’Organisation internationale du travail (OIT) qu’au niveau europĂ©en. La Convention no 87 de l’OIT du 9 juillet 1948 consacre la libertĂ© syndicale dans ses deux dimensions, individuelle et collective. En 1951, l’OIT a crĂ©Ă© un ComitĂ© de la libertĂ© syndicale chargĂ© d’examiner les plaintes dĂ©posĂ©es par des organisations syndicales contre un État membre.

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Au niveau europĂ©en, la libertĂ© d’association est proclamĂ©e par la Convention europĂ©enne de sauvegarde des droits de l’homme dans son article 11, paragraphe 1 : « Toute personne a droit Ă  la libertĂ© de rĂ©union pacifique et Ă  la libertĂ© d’association, y compris le droit de crĂ©er des syndicats avec d’autres et adhĂ©rer Ă  des syndicats pour dĂ©fendre ses intĂ©rĂŞts. » Enfin, la libertĂ© syndicale est prĂ©vue par l’article 5 de la Charte sociale europĂ©enne du 18 octobre 1961 et par l’article 11 de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs du 9 dĂ©cembre 1989.

Liberté collective de créer un syndicat :

La libertĂ© d’association concerne principalement la libertĂ© d’Ă©tablissement et de fonctionnement des organisations professionnelles. La libertĂ© de crĂ©er un syndicat se caractĂ©rise par une grande flexibilitĂ© en termes de formalitĂ©s. Les pouvoirs publics n’exercent aucun contrĂ´le prĂ©alable sur sa crĂ©ation. Le syndicat peut ĂŞtre crĂ©Ă© par des personnes exerçant la mĂŞme profession, une profession similaire ou apparentĂ©e. Le syndicat doit avoir un but et une cause lĂ©gitimes. L’article L2131-1 du Code du travail stipule que « les syndicats professionnels ont exclusivement pour objet d’Ă©tudier et de dĂ©fendre les droits et les intĂ©rĂŞts matĂ©riels et moraux, tant collectifs qu’individuels, des personnes mentionnĂ©es dans leurs statuts » commercial.

Les statuts du syndicat et la liste des dirigeants doivent ĂŞtre dĂ©posĂ©s Ă  la mairie. L’accomplissement de ses formalitĂ©s conditionne l’accès du syndicat Ă  la personnalitĂ© juridique, lui permettant notamment d’engager des actions en justice pour dĂ©fendre l’intĂ©rĂŞt collectif de la profession et de ses membres.

Les syndicats ayant un intérêt commun peuvent former un syndicat ou une fédération syndicale.

LibertĂ© de association concerne Ă©galement la libertĂ© de dissoudre volontairement un syndicat . La dissolution peut ĂŞtre prononcĂ©e par l’arrivĂ©e du terme prĂ©vu par les statuts ou dĂ©cidĂ© par un vote unanime de l’assemblĂ©e. La dissolution peut Ă©galement avoir lieu en raison de l’illĂ©galitĂ© des dispositions lĂ©gales ou d’une faute commise par les dirigeants, elle est ensuite prononcĂ©e par le juge judiciaire saisi par le procureur.

LibertĂ© individuelle d’adhĂ©rer Ă  l’union de son choix ou de ne pas adhĂ©rer :

Le droit d’adhĂ©sion est Ă©tabli par l’article L2141-1 du Code du travail  : « Tout salariĂ© peut librement adhĂ©rer au syndicat professionnel de son choix ». Cette libertĂ© est protĂ©gĂ©e face aux pressions exercĂ©es par l’employeur qui ne doit pas envisager d’adhĂ©rer Ă  un syndicat.

L’article L2141-5 du Code du travail stipule que la protection se situe au stade de l’embauche, de l’exĂ©cution de la relation de travail, de la discipline et de la rĂ©siliation du contrat de travail. Il s’agit d’une libertĂ© fondamentale du salariĂ©, renforcĂ©e par l’interdiction de la discrimination syndicale directe et indirecte, garantie par l’article L1132-1 du Code du travail .

Le corollaire de la libertĂ© d’adhĂ©sion est la libertĂ© de ne pas adhĂ©rer Ă  un syndicat. Il est interdit Ă  l’employeur de faire pression en faveur d’un syndicat ou de payer des cotisations soit Ă  la place du salariĂ©, soit par dĂ©duction directe du salaire. L’employĂ© est Ă©galement protĂ©gĂ© contre les pressions exercĂ©es par le syndicat. Il doit pouvoir se retirer du syndicat Ă  tout moment, sans prĂ©avis et sans pĂ©nalitĂ© financière (article L2141-3 du Code du travail). Enfin, la libertĂ© syndicale des employĂ©s est renforcĂ©e par l’interdiction des clauses de fermeture des ateliers prĂ©voyant le recrutement prioritaire, voire exclusif, des membres des syndicats. qui sont signataires de la convention collective. Ils sont largement pratiquĂ©s dans les pays anglo-saxons et en Belgique et se sont parfois rĂ©vĂ©lĂ©s contraires Ă  la Convention europĂ©enne de sauvegarde des droits de l’homme (CEDH, 13 aoĂ»t 1981).

Aurélie Courteville et Timothy Cicerchia

Étudiants du Master I en droit social, Université Paris-II Panthéon-Assas

Pour en savoir plus :

  • Les sources de la libertĂ© d’association :

Préambule de 1946 : http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Constitution/Preambule-de-la-Constitution-du-27-octobre-1946

Convention 87 de l’OIT : http://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=1000:12100:0::NO::P12100_ILO_CODE:C087

Article L2131-1 du Code du travail : http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006901583&cidTexte=LEGITEXT000006072050&dateTexte=20130625&oldAction=rechCodeArticle

Articles L2141-1, L2141-3 et L2141-5 Code du travail :

http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=A3D4F2ABA64743F19EF8DE032F1587D5.tpdjo13v_1?idSectionTA=LEGISCTA000006177917&cidTexte=LEGITEXT000006072050&dateTexte=20130625

  • Programme de la grande confĂ©rence sociale des 20 et 21 juin 2013 :

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/Feuille_de_route_sociale_2013_VF.pdf

  • ArrĂŞt de la CEDH 13 aoĂ»t 1981, Dr. Soc. 1986, p. 384, note BĂ©raud .

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